Le fantasme de la forêt vierge

Quand j’étais gosse, je me rappelle des cours de géographie sur la forêt Amazonienne. Les poumons de notre planète, un joyau qui renferme des milliers d’espèces.
Déjà à l’époque, la déforestation était un sujet brûlant. « La forêt est en danger ! » nous répétait notre professeur.
Aujourd’hui j’ai presque 25 ans. J’aurais aimé pouvoir dire que la déforestation c’est de l’histoire ancienne. Des trucs qu’on me racontait quand j’étais petit.
Mais à Bornéo, 500 000 hectares de forêt tropicale continuent de disparaitre chaque année. L’équivalent d’un terrain de football qui part en fumée chaque minute.
Plus que jamais, la forêt brûle pour laisser place aux cultures d’huile de palme en Indonésie, ou aux cultures de soja en Amazonie.
« On ne peut rien faire », « c’est déjà trop tard », « les orangs-outans sont condamnés ! »
Ces messages anxiogènes, vous les avez probablement déjà entendus. Des problèmes, toujours des problèmes… sans réelles solutions apportées.
Pas étonnant que des milliers de personnes baissent les bras ! Le pessimisme vole notre espoir. Il ne laisse aucune place aux utopies.
Pourtant face aux défis écologiques et humains qui se dressent devant nous, nous avons plus que jamais besoin d’espérer, d’entreprendre et d’agir.
Nous avons besoin de croire en une nouvelle utopie. De briser les diktats pour s’affranchir du vieux monde.
L’explosion d’internet a rendu l’information accessible en quelques clics. Il est aujourd’hui facile de décrypter des systèmes complexes, pour mieux les contrer.
Prenons par exemple le cas de la déforestation. Un système opaque en proie à de nombreux fantasmes.
Dans l’imaginaire collectif, les forêts tropicales sont perçues comme de grandes étendues vierges. Des terres où seuls les animaux dictent leurs lois.
Impénétrable. Mystérieuse. La forêt n’obéit à rien, et n’appartient à personne.
Les braconniers sont des sauvages. Les bulldozers pilotés par des gangsters. Les feux de forêts déclenchés par des criminels sans visage.
La déforestation est alors perçue comme un ennemi invisible, les forêts tropicales condamnées à disparaître.
Pour sauver la forêt, nous devons en finir avec le fantasme d’une forêt qui n’appartient à personne. La déforestation est une activité commerciale organisée.
En Amazonie, en Indonésie ou en Malaisie, la plupart des forêts sont régies par des plans d’occupation des sols. Des cadastres. Les terres forestières ont des statuts.
Les compagnies d’huile de palme portent des noms. Leurs méthodes pour déforester sont connues.
« Les compagnies d’huile de palme proposent aux propriétaires terriens de cultiver des palmiers à huile sur leurs terres. Alors, pour déforester avant de planter, les propriétaires brûlent leurs forêts. Ce qui permet aussi aux compagnies de ne pas être accusées de le faire. » Chanee, créateur de l’ONG Kalaweit.
Et vous savez quoi ? Pour contrer les systèmes mis en place par les compagnies d’huile de palme, des solutions concrètes existent. Une nouvelle utopie est possible.
Loin des campagnes de publicités et des études environnementales, Kalaweit est l’une de ces associations qui agissent sur le terrain (certains commencent à bien la connaître par ici…).
Depuis des années, elle rachète des hectares de forêt tropicale pour les transformer en réserves naturelles, et ainsi les sauver des griffes des industriels.
« Les compagnies d’huile de palme acquièrent des terrains pour déforester ; si on le fait à leur place, elles ne pourront plus mener leur projet. » Chanee
En ce moment, Chanee et ses équipes se battent pour préserver 1500 hectares cernés par les industriels : la forêt de Dulan.
1500 hectares de forêt vierge que les villageois souhaitent revendre. En priorité à Kalaweit. Mais si l’argent n’est pas récolté assez vite, ils céderont leurs terres aux compagnies d’huile de palme.
Un hectare coûte 900€. Avec 300 000 euros, Kalaweit estime pouvoir sécuriser cette forêt. Vous imaginez ? Seulement 300 000 euros !
Aujourd’hui j’ai presque 25 ans. Et si je suis convaincu d’une chose, c’est qu’ensemble, on a le pouvoir de sauver la forêt tropicale.
Loin des diktats du vieux monde, dessiner une nouvelle utopie est possible.
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